Le décro dynamique, le comprendre ou finir dans les arbres – Le bras hauts de sécurité, le faire ou finir dans les arbres
Je partage les deux principaux apports que je retiens du dernier stage SIV suivi avec David Eyraud à l’automne.
1er : le décro dynamique
Le décro accidentel, pas la figure d’accro qui consiste à décrocher en fin de ressource.
Le décro dynamique accidentel est, je pense, le sur-pilotage le plus courant qui transforme une banale fermeture en cascade d’incidents. Il est donc essentiel de savoir ce que c’est, savoir dans quelle configuration ça risque d’arriver et savoir quelle action du pilote le déclenche pour l’éviter ; et si ça arrive, pour réagir correctement et ne pas finir dans les arbres. 😉
Le cas typique.
« J’ai pris une grosse abattée qui m’a surpris. J’ai vu la voile plonger devant moi, j’ai réagi un peu tard mais je l’ai bloquée et la j’ai rien compris. La voile est partie d’un coup derrière et après elle ne s’est jamais remise en vol. Elle a shootée 2-3 fois violemment, à chaque fois je la contrais mais elle repartait derrière. » Et comme ça jusqu’aux arbres ou jusqu’à tirer le secours…
Peut être que certains ont déjà entendu cette histoire ou l’ont même vécue.
Et comme une vidéo vaut mieux qu’un long discours, un beau cas d’école sur un exercice de tangage, ou comment une abattée mal gérée pourrait se finir dans les arbres…
Le décro dynamique dans ce cas, est un décro accidentel provoqué par un freinage au moment ou la voile cherche et à besoin de reprendre de la vitesse après l’abattée, au début de la phase d’accélération. Ce qui est perturbant, c’est que le décro peut être provoqué avec très peu de freins et avec la voile devant soi.
Sur la vidéo, le pilote, qui souhaite garder l’anonymat, ne freine pas assez son abattée, trop tard ou pas assez fort. Il se prend une belle frontale et garde un peu de frein. Il remonte les mains mais pas complètement. La voile décroche coté droit et part en vrille, alors qu’il n’a pas les mains très basses, elles sont clairement au dessus des maillons.
Cela peut arriver aussi sur une grosse abattée, sans frontale. En fin d’abattée, la voile est quasiment à l’arrêt, voire à l’arrêt sur des grosses abattées. C’est le petit moment de flottement pas très agréable. Le réflexe le plus courant est de vouloir faire quelque chose, s’accrocher aux freins pour sentir de la tension, et penser ainsi éviter la frontale. Mais à ce moment la c’est déjà trop tard, la voile cherche à reprendre de la vitesse ; et si un peu de frein est maintenu, cela l’empêche d’accélérer. Elle peut alors subitement décrocher, alors qu’elle est devant le pilote, que le pilote ne met pas beaucoup d’amplitude de frein, ni beaucoup de tension dans les freins.
C’est le pourquoi du « tempo-bras hauts ». Une temporisation d’abattée ce n’est pas simplement « tempo », c’est « tempo-bras hauts » avec une remontée des mains très rapide, le plus rapide possible sur les grosses abattées, quasi instantanée.
La cascade d’incident que je décrivais au début, n’est rien qu’une succession de décros dynamiques due a un pilote dépassé par les mouvements de sa voile qui essaie de bloquer les « shoot » mais qui le fait trop tard ou qui maintient un peu trop les freins en fin d’abattée.
Pour l’éviter il faut donc apprendre à dissocier toutes les phases d’un mouvement de tangage et notamment déceler précisément le moment de fin d’abattée où il faut remonter immédiatement les mains.
La technique de David Eyraud : le regard ; nos sensations ne sont pas suffisamment fines pour identifier précisément le moment où il faut se remettre bras hauts.
Il faut fixer son regard à 45˚ par rapport à l’horizon, ne plus le bouger et observer sa voile évoluer dans son champ de vision par rapport à l’horizon. Quand la voile descend elle est en phase d’abattée, c’est la que je freine pour ralentir et bloquer l’abattée. Quand elle s’arrête de descendre c’est la fin de l’abattée il faut se remettre bras hauts. La voile remonte, elle est en phase d’accélération il faut garder bras hauts. Si j’ai encore un peu de freins lorsqu’elle commence à remonter je suis en retard et je risque de décrocher.
Et si tu penses maitriser à fond le tangage, passe devant une camera en SIV et tu verras, dans le meilleur des cas que tu peux améliorer encore ton pilotage – ta voile est tolérante mais comment sera la prochaine… Dans le pire des cas qu’il y a des moments où tu es complètement à la rue.
Sur les vidéos du SIV, j’ai remarqué comme beaucoup (tout le monde ?) que j’étais souvent un peu en retard pour remonter les mains. J’ai même fait un décro dynamique sur des wings. Un peu en retard sur le dernier, je sens la voile un peu molle, qui va fermer, je maintiens du frein pensant éviter la fermeture et bim décro.
Pareil pour le meilleur pilote du groupe qui a fait de belles amorces de décro sur des abattées en sortie de décro classique.
Et il faut se rappeler que lors d’un squetch tu seras forcément surpris, moins lucide, et ton pilotage sera moins précis qu’en stage. D’où l’intérêt de travailler encore et toujours le tangage pour que cela devienne une gestuelle « reflexe ».
Deux éléments à retenir donc.
- En fin d’abattée ou après une frontale, il est donc possible de décrocher la voile devant soi, avec très peu d’amplitude de freins et de force dans les freins et sans que la voile ne prévienne comme sur un décro classiquement provoqué depuis un vol droit stabilisé.
- La remontée des mains après une temporisation d’abattée doit être immédiate et rapide.
2ème : le bras hauts de sécurité
J’en viens naturellement au deuxième élément retenu de ce stage pour éviter les cascades d’incidents, le bras hauts de sécurité de David Eyraud.
Pour illustrer, revenons sur la vidéo de notre cas d’école. Au passage un grand merci à lui pour ce dévouement, cette abnégation, ne craignant à aucun moment durant tout le stage de finir à barboter dans le lac, tout habillé dans sa sellette, aux cotes des canards et des cygnes, donnant de sa personne pour faire progresser tous les membres du club ! Respect Monsieur !
Donc sur ce cas, seule la demi-aile droite décroche. La voile part donc en vrille et elle est maintenue au début en vrille par le freinage coté droit. Le pilote est bien secoué dans sa sellette, il pense être bras hauts mais son bras droit se ballade loin des élévateurs. La voile ne se remet en vol que quand le pilote revient bras hauts.
C’est aussi une des causes de la cascade d’incidents ; lorsque la voile ne se remet pas en vol, reste en vrille, en décro ou en parachutale parce que le pilote garde malgré lui un peu de freins. Et il ne faut parfois pas beaucoup de freins pour maintenir la voile hors du domaine de vol, 5cm, voire moins. Toutes proportions gardées – leurs voiles ayant un débattement plus cours que les nôtres – regardez les acrobates en hélico, ils ont quasiment les mains aux maillons.
Si tu es secoué lors d’un squetch, même si tu as les bras tendus, tu vas rapidement avoir les bras qui vont partir un peu à droite ou à gauche des élévateurs et mettre un peu de freins. D’où la technique de David Eyraud pour se mettre réellement bras hauts, s’accrocher en hauts des élévateurs aux niveaux des petits maillons sur lesquels sont fixées les suspentes. Ainsi même bien secoué, à moitié twisté, la tête en bas, tu es sur d’être bras hauts et de ne pas mettre un cm de freins. En plus cette position te permet de mieux résister au twist et t’empêche de mettre les petits coups de freins dus à la peur quand tu es dépassé par les événements.
Voila ne vous reste plus qu’à travailler encore et encore le tangage, mouvement essentiel à maitriser pour voler en sécurité en thermiques. Et remettez sans cesse en question votre pilotage, votre analyse. Repassez devant les yeux experts des moniteurs et faites un SIV !
Ce n’est pas forcement un stage où l’on se met la tête à l’envers. Je considère que c’est le seul stage qui vous permet de progresser en technique pure de pilotage. Tous les pilotes qui volent en thermiques devraient en faire, ne serait-ce que pour faire du tangage et débriefer sa gestuelle devant la vidéo. Et ça tombe bien le club en organise tous les ans…